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SAVOIR-FAIRE ORGANISER-GERER
Border la
conception de ses
notices techniques
L'élaboration et l’édition d’une notice technique n’est pas un exercice facile.
Les obligations en matière d’information aux consommateurs sont strictes et les
manquements lourdement sanctionnés. À chaque entreprise sa méthode.
“а це! que soit le secteur
= Ÿ) dans lequel elles inter-
$ viennent, les entreprises
= ÿ sont tenues d'accompa-
E gner chacun de leur pro-
duit ou service de notices tech-
TROIS BONNES PRATIQUES
> Prévoir une
«check-list»
des utilisations
— a ES
E
<a de danger.
> Utiliser la couleur
pour les indications
a ore a A UFI]
CRA
= —] = = т
== Á WARNMINT
eR WETTER INA
niques et d’un mode d'emploi. Pour- anormales Privilégier
tant, la réalisation de ces documents de т les pictogrammes
indispensables, parfois édités a des l'appareil — / e Débranchez l'appareik==="" aux dessins
millions d'exemplaires, est encore afin de utilisation ou avant le zee complexes.
souvent considérée par les fabri- rédiger les \ ® Avant chaque utilisatj======; > Confier les traductions à un cabinet
cants comme une contrainte. Nom- obligations \ plateau ramasse-mjé 55 RSA spécialisé. Constituer une équipe
breuses sont les notices rendues in- généralesde ™qusle grille-paiz” Sal La pluridisciplinaire pour la validation finale
compréhensibles par leur complexi- sécurité, EA du document.
té ou par la mauvaise qualité des
traductions. Méme les grandes
marques n'échappent pas a la regle.
Pourtant, en cas d'accident, la
moindre négligence peut se trans-
former en catastrophe pour l’entre-
prise, «Lorsque le pépin survient, la
première chose que réclame l'ex-
pert, c'est la notice d'utilisation»,
explique le directeur marketing d'un
grand fabricant de jouets. Rares sont
les entreprise qui avouent avoir été
prises en défaut. Plus rares encore
celles qui confient avoir été confron-
tées à un problème grave. Mais le
risque encouru-—ou la prise de cons-
cience que ces documents, lorsqu'ils
sont mal réalisés, laissent une image
désastreuse chez le client-incitent
les entreprises à prendre la mesure
du problème.
La principale difficulté pour elles
consiste à prévoir la palette des usa-
ges anormaux auxquels risquent
d'être soumis les appareils mis sur
le marché. Un exercice indispensable
pour intégrer d'éventuelles mises en
garde dans les précautions d’usage.
Sur ce point, l’article L 221-1 du
code de la consommation est sans
appel:il précise que les produits
doivent présenter la sécurité à la-
quelle ont peut légitimement s'’at-
tendre dans les conditions normales
d'utilisation «oudans d'autres condi-
tions raisonnablement prévisibles
par le professionnel. »
«Il s'agit d'un exercice délicat,
constate Laurent Delange, respon-
sable qualité du groupe Seb. Ce qui
est anormal pour le constructeur ne
l'est peut être pas pour le consom-
mateur,» Pour résoudre le problè-
me, le fabricant a établi en interne,
une liste des utilisations anorma-
les constatées sur les produits qu'il
met sur le marché. «Dans chaque
cas, nous testons la réaction de nos
produits dans ces situations, ex-
plique Laurent Delange. Dès lors
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SAVOIR-FAIRE ORGANISER-GÉRER
SB a eT
HT (suite de la page 94) notices, com-
mente Laurent Delange. La prise en
compte de ces attentes peut nous
emmener assez loin.
L'adaptation des procédés aux pays
dans lesquels nous vendons nos pro-
duits par exemple, implique la réali-
sation de tests complexes qui doi-
vent être mis en œuvre en amont, en
même temps que la mise au point
des produits.» En charge de ces dos-
siers, Laurent Delange a opté pour la
création de petits groupes de pro-
jets pluridisciplinaires, afin de plan-
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cher sur ces sujets:des représen-
tants du marketing, des diverses fi-
liales de l'entreprises (le groupe Seb
compte plusieurs dizaines de
marques), des ingénieurs dévelop-
pement mais aussi des imprimeurs,
auront la charge de définir, à partir
des données exprimées par les
consommateurs, l'ensemble des bon-
nes pratiques relatives à l’élaboration
des modes d'emploi.
«L'idée est d'arriver rapidement à
formaliser 20 règles de conception
partagées par l'ensemble du grou-
utilise internet pour compléter
son information produits
Les documents papier sont recentres sur l'essentiel.
our le fabricant isérois d'équipe-
Pron: de montagne, Petzl, les no-
tices techniques prennent une im-
portance toute particulière: « lorsque
vous enfilez un harnais, que ce soit
pour une ascension ou pour travailler
sur un pylône, vous lui confiez tout
simplement votre vie», insiste Da-
mien Piat, responsable du contenu
technique des documents livrés avec
chaque équipement de protection. Il
est au centre de tous les développe-
ments de produits: il récupère les
informations auprés des chefs de
projets, participe a la phase d'analy-
se des risques lors des essais de ma-
tériels, et supervise l'ensemble de la
production des notices.
Au-delà du soin particulier que Petzl
attache à l'élaboration de ces docu-
pe, afin d'harmoniser l'ensemble des
procédures. » Opérationnelles d'ici a
quelques mois, certaines de ces nou-
velles regles ont d'ores et déjà été
définies.
Priorité aux pictogrammes
Cinq formats types ont été arrêtés et
la priorité sera donnée aux picto-
grammes. Ceux-ci seront disposés
dans le mini-guide de démarrage, sur
le verso de la couverture.
« Nous essayons d'établir un projet
de notice le plus en amont possible,
explique encore Laurent Delange.
Mais dans tous les cas, l'élaboration
de la notice sera toujours de la
responsabilité de l'équipe qui a dé-
veloppé le produit, afin de pouvoir
facilement intégrer des modifications
lorsque c'est nécessaire.» Les tra-
ductions seront systématiquement
validées par le marketing produit,
mais aussi par les différents respon-
sables pays, pour l'export. Enfin, par
souci d'économie, l'impression sera
systématiquement réalisée là où le
produit est fabriqué et emballé. ©
Damien Piat,
responsable du
contenu technique
des notices. lci, en
test de securite
Le contexte ; Petzl, spécialiste
des équipements de montagne,
edite 10 000 notices d'équipements
de protection chaque année,
(200 000 pour les lampes
frontales). I
Les contraintes : ->Imperatif-
de sécurité dans les équipements
de haute montagne
> Nombre de langues: 5
FRANÇOIS HENAY/REA POUR L'USINE HOUVELLE
> Coût par notice: entre
80 centimes et | euro.
ments, l’entreprise doit aujourd'hui
faire face à la fois à sa volonté d'ac-
croître le nombre de langues dans
lesquelles les notices sont traduites
- elle souhaite rapidement passer
individuelle sur
le materiel Petzl
(casque, harnais
mousquetons,
| descendeurs).
de 5 à 22 langues - tout en
gérant la complexité crois-
sante des données tech-
niques qui les accompagnent. « De-
puis toujours, nos produits sont uti-
lisés dans des fonctions pour
lesquelles ils n'ont pas forcément été
prévus à l'origine, explique Damien
Piat, Un système d'assurage peut par
exemple être utilisé en rappel. Jus-
qu'à présent, nous présentions ces
utilisations annexes dans nos noti-
ces, sur un volet à part, explique-t-il.
Mais cette option devenait impossi-
ble dès lors que nous passions à 22
langues. »
Ne plus faire figurer
que les fonctions de base
Pour contourner l'obstacle, Petzl|
vient de décider de ne faire figurer
sur les notices imprimées que les
fonctions de base, ainsi que les men-
tions obligatoires légales impliquant
la responsabilité de l'entreprise. Et de
renvoyer sur internet l'ensemble des
fonctions annexes et le rappel des
utilisations à proscrire. « Cette option
nous permet de diminuer l’épaisseur
de nos notices et de les imprimer en
quadrichromie pour un coût prati-
quement inchangé, entre 0,80 et
| euro pièce », explique Damien Piat.
Tout en incitant les utilisateurs à
venir se connecter plus souvent sur
le site de l'entreprise. Y.D.O
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N°2978 / 22 SEPTEMBRE 2005 |
qu’une utilisation représente un dan-
ger pour l'utilisateur, nous essayons
d'intervenir dès la conception de
l'appareil afin de prévoir des systè-
mes de protection spécifiques.» Les
radiateurs à bain d'huile de Calor,
par exemple, ont été équipés d'un
second limiteur thermique dans la
partie basse de l'appareil, afin
d'éviter les risques de surchauffe
lorsqu'ils sont placés en position
couchée. Le fabricant intervient sur
la conception dans 30 à 40% des
cas. Dans toutes les autres situa-
tions, le danger encouru est expli-
citement mentionné sur la notice.
«En cas d'omission, l’entreprise
risque de ne pas être couverte», in-
siste Laurent Delange.
Une notice à présenter,
24 ans apres...
Ce qui vaut pour l'électroména-
ger, vaut également pour les biens
d’équipement durables. Pour cha-
cune de ses installations, le leader
mondial du transport par cable, l'i-
sérois Pomagaslki doit ainsi prévoir
tous les types de défaillances pos-
sibles, piece par piéce, et dans tou-
tes les conditions d'utilisation, Un
travail indispensable pour préciser
à l'exploitant la fréquence des visi-
tes de contrôle, les couples de ser-
rage, la vitesse des rotations... «Cet
ensemble de précautions nous per-
met d'analyser les risques et de cou-
vrir l'entreprise en cas de défaillan-
ce, explique Jean-Paul Huard, char-
gé des études chez Pomagalski.
Mais c'est á double tranchant, car si
nous nous engageons à préciser
tout ce qui doit être fait pour assu-
rer la sécurité du matériel et des
personnes ou des biens transpor-
tés, nous devons être certains de ne
rien oublier », reconnaît-t-il, Lors de
l'enquête ouverte à la suite de lac-
cident du téléphérique du Pic de
Bure, le 1* juillet 1999, dans lequel
20 personnes avaient trouvé la mort,
l'entreprise a dû présenter l’ensem-
ble des documents techniques, édi-
tés 24 ans plus tôt. «Si nous n'a-
vions pas pu ressortir le dossier de
mise en route de l'appareil, la noti-
ce de conduite et le réglement de
police, nous serions aujourd’hui
dans une trés mauvaise posture»
insiste Jean Souchal, reponsable
des installations chez Pomagalski.
L'autre écueil auquel les entrepri-
ses sont souvent confrontées est
celui de la simplification. Pour Jan
Fredlund, chargé de superviser les
milliers de notices qui sortent cha-
que année des bureaux de Ikea of
Sweden, la conception d’une notice
claire, quel que soit le profil du
consommateur, relève de l'exercice
Laurent Delage,
responsable
qualité du groupe
Seb, devant une
ligne de montage de
centrale vapeur.
Limpression des
nr
notices est realisée E
as
a proximite des EAT
= ===
lieux de production. Wl
Е ern
ln mari
E я
impossible : «la notice d'assemblage
universelle n'existe pas, concéde-t-
il. Selon votre áge, le pays ou vous
habitez, l'interprétation des illustra-
tions et des textes du mode d'emploi
seront différents. On peut seulement
essayer de répondre aux attentes du
plus grand nombre.» Pour y parve-
nir, le premier distributeur de meu-
bles a choisi une méthode simple.
Alors qu'elles étaient jusqu'á pré-
sent gérées par la production, toutes
= ri — * "==.
$ к mz
—————
a
—— ——
MEE
LEE
RE
i М
PHL
i Г
les notices de montage sont au-
jourd’hui validées par une équipe
pluridisciplinaire issue de différen-
tes origines. Et si le consommateur
hésite encore sur le sens du mon-
tage, il peut trouver sur internet des
vidéos explicatives.@ YVES DOUGIN
ENCORE PLUS D'INFOS
usinenouvelle.com |
> Complétez vos informations avec
des liens sur notre site
USINE HOLIWELLE
CORALIE MOULIH FOUR
s'appuie sur des groupes de projet
Le fabricant a déja défini cing formats types pour ses notices.
I leader mondial du petit électro-
ménager a publié quelque 35 mil-
lions de notices techniques en 2004,
Soit un budget global de 3 millions
d'euros. Logique, donc, que le grou-
pe soit particulierement sensible á
leur mise en ceuvre, leur niveau de
Le contexte : le groupe Seb lance
150 nouveaux produits par an
Les contraintes : 35 millions de
notices sont imprimees chaque
année en 22 langues
Le budget : coût total annuel:
3 millions d'euros
qualité et leur coût. En interne, Seb
vient même de définir un programme
de travail spécifique afin d'en amé-
liorer la présentation à budget cons-
tant. «Nous sommes alertés régu-
lierement par les remarques des
consommateurs sur ces sujets, ex-
plique Laurent Delange, responsa-
ble qualité du groupe. Ces remon-
tées d'informations nous ont incités
à réfléchir sur les méthodes qui nous
permettent de nous améliorer. »
Le fabricant s'est ainsi fendu d'une
étude approfondie auprès de |27
clients de différents pays, afin de
mieux cerner leurs attentes. Première
surprise, l'enquête indique que 91 %
des utilisateurs lisent les notices d'u-
tilisation… Deuxième surprise : 48 %
des personnes interrogées ne veulent
pas d'un document rédigé dans une
langue unique. Et pour finir, les con-
sommateurs déclarant tenir aux des-
sins et aux pictogrammes sont aussi
nombreux que ceux qui sont atta-
chés aux textes.
« I[ n’y a pas de solution unique pour
la présentation des (suite page 94) ///
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L'USINE NOUVELLE | 93
HE NOUVELLE
Frio -
AT HENAT/REA FOUR LUE!
= ет таро
В masse de documents techniques
edités par Pomagalski est a la
hauteur des équipements réalisés
par le premier constructeur mondial
de systèmes de transport par câble.
Impressionnant!
Les seuls documents justifiant du
bon déroulement d'une installation,
qui intégrent les notices de cons-
truction remises aux sous-traitants
chargés de sa mise en œuvre, repré-
sentent pas moins d'un bon demi-
mêtres cubes de cartons, chemises
et classeurs. Ces pièces s'accompa-
gnent de deux à trois gros classeurs
supplémentaires, qui serviront de
guide de conduite et de maintenan-
ce pendant toute la durée de vie de
l'appareil.
Faire un effort de
standardisation
«Nous sommes contractuellement
tenus d'assurer le suivi des appa-
reils auprès de nos clients, souvent
pendant plusieurs dizaine d'année »,
explique Jean Souchal, responsable
des installations. Ces documents
techniques serviront d'interface entre
3 POMAGALSKI|
balaie l'ensemble des risques pour se couvrir
Les notices abordent les procédures de stokage, d'assemblage et de maintenance.
*
+ {
ME ce E
x ля
ho a ЗЕЕ Ню
Le contexte Pomagalski equipe
6 a 7 000 installations dans
le monde, dont certaines
ont une quarantaine d'années.
Les contraintes Chaque installation
dispose de sa propre notice
technique. Celle-ci représente
l'équivalent de 3 gros classeurs.
Editée dans la langue du pays où
est implanté le matériel, elle est
doublée en anglais, si la langue
du pays est rare.
tous les opérateurs amenés à inter-
venir pendant l’exploitation de la re-
montée. Rédiges en anglais pour les
pays non francophones, en plus de la
langue locale, ils compilent l'ensemble
des spécifications relatives à la pro-
duction, au stockage, à l'assemblage
et à la maintenance de l'appareil.
À chaque type d'exploitation cor-
respond une série de mesures et de
normes de sécurité spécifiques: la
résistance à l'eau ou aux ultraviolets
ou encore les niveaux d'usure sont
fixés en fonction des conditions d'ex-
ploitation de l'appareil.
Mais tout n'est pas à refaire à chaque
installation. Heureusement! Aujour-
d’hui, la plupart des télésièges sim-
ples fixes sont constitués à 80%
Jean Souchal,
responsable des
installations et
Jean-Paul Huard,
responsable des
études et du
développement
du fabricant de
EI EL TEE
Pomagalski.
densembles standards et pour 20%
de pieces specifique. « Ce ratio nous
permet, lors de la rédaction des no-
tices, de realiser des « copiés-col-
lès» pour l’ensemble des parties
communes, ce qui accélère l’ensem-
ble des procédures », poursuit Jean
Souchal.
Privilegier Panglais
Pour les traductions, l'entreprise fait
appel à des professionnels asser-
mentés, ou confie le travail à ses
agents à l'étranger. Mais dès lors que
la langue devient complexe et que
les risques d'erreurs augmentent, le
document anglais, joint à celui rédi-
gé dans la langue du pays, devient
incontournable, Tout comme l'ajout
de parties didactiques illustrées de
schémas et de photos. «Dans cer-
tains pays, nous sommes autorisés à
livrer des contrats et des notices ex-
clusivement en anglais. Mais en règle
générale, conclut Jean Souchal, nous
allons à l'essentiel en insistant sur les
signaux de danger et en illustrant les
principales procédures, surtout lors-
qu’elles sont complexes». ©
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