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Nature de la pédagogie différenciée
et analyse des recherches portant sur
l’efficacité de cette pratique pédagogique
Véronique Jobin et Clermont Gauthier
Faculté des sciences de l'éducation, Université Laval, Canada
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Abstruct
Dans plusieurs pays développés, le thème de la pédagogie différenciée est fréquemment abordé dans les discours pédagogiques. Étant donné la popularité du concept et même
la recommandation de l’implantation de cette pratique pédagogique, nous avons tenté d’en
comprendre la nature et de vérifier si l’efficacité de ce type de pédagogie a été démontrée par
la recherche sur le terrain. Parmi cent quatre-vingt-neuf documents (n = 189) analysés,
treize recherches empiriques ont été identifiées. Huit d’entre elles ne présentent aucune
preuve d’efficacité. Ces résultats nous ont amenés à conclure que peu d’effets de la pédagogie différenciée sur la réussite des élèves ont été démontrés empiriquement et que la prescription de cette pratique pédagogique repose sur des preuves d’efficacité fort limitées.
Introduction
Les classes d’aujourd’hui sont hétérogènes. Que ce soit sur le plan cognitif, social,
culturel ou affectif, les élèves faisant partie d’un même groupe présentent des différences
sans doute plus importantes que ceux d’autrefois. Dans ce contexte, les responsables des
systèmes d’éducation de plusieurs régions du monde se demandent quelles pratiques pédagogiques mettre en place pour favoriser la réussite scolaire de tous. La pédagogie différenciée apparaît aux yeux de bon nombre d’entre eux comme une solution voire une nécessité
pour faire face à la diversité des élèves dans les écoles. Nous pensons, à l’instar d’Ellis
(2001), qu’avant de généraliser une pratique pédagogique, il faut s’assurer que l’efficacité de
cette dernière a été démontrée par la recherche empirique. Qu’en est-il de la pédagogie différenciée? La première section de cet article contient une description de la nature de cette
pratique pédagogique. Dans la seconde partie, nous présentons une analyse des recherches
portant sur l’efficacité de ce type de pédagogie.
1. Nature de la pédagogie différenciée
Les écrits sur la pédagogie différenciée se retrouvent en abondance dans les milieux
de l’éducation et les perspectives des auteurs sont nombreuses. Il peut donc être difficile de
s’y retrouver. Qu’est-ce que la pédagogie différenciée? Pour répondre à cette question, nous
avons étudié deux aspects de cette pratique pédagogique, soit ses définitions et les idées1
. Brock Education - A Journal of Educational Research and Practice vol. 18 n° 1, 2008
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clés figurant dans les écrits à son sujet.
1.1. Définitions
Selon Forsten et collab. (2002), différencier la pédagogie, c’est connaître une variété
de stratégies d’enseignement et savoir quand et avec qui les utiliser. Partageant cet avis,
Heacox (2002, p.1) définit la pédagogie différenciée comme « a collection of strategies that
help you better address and manage the variety of learning needs in your classroom ». Elle
explique que ce sont les besoins et les caractéristiques individuelles des élèves qui guident le
choix des différentes stratégies d’enseignement. Cette idée nous conduit à la définition de
Fresne (1994, p.4) pour qui ce type de pédagogie correspond à « une pratique d’enseignement
qui consent aux différences inter-individus et qui tente d’organiser les apprentissages en tenant compte de chacun ». Przesmycki (2004, p.10) précise que la pédagogie différenciée
s’inscrit « dans une démarche collective d’enseignement des savoirs et savoir-faire communs
exigés ». Vecchi (2000, p.178) écrit qu’elle « permet à chacun d’atteindre les mêmes objectifs
(ou un certain nombre d’objectifs communs) ». Les propos de ces auteurs sont bien synthétisés par Perraudeau (1997, p.112-113) qui conçoit la différenciation pédagogique comme une
« diversification des supports et des modes d’apprentissage pour un groupe d’apprenants aux
besoins hétérogènes mais aux objectifs communs ».
Perrenoud (1995, p.29) considère ce type de pédagogie comme une façon d’organiser
« les interactions et les activités, de sorte que chaque élève soit constamment ou du moins très
souvent confronté aux situations didactiques les plus fécondes pour lui ». Il semble que
l’enseignant qui différencie sa pédagogie cherche à maximiser le talent de chaque élève. Du
moins, c’est dans cette optique que Convery et Coyle (1993, p.1) proposent la définition suivante de la pédagogie différenciée : « Differentiation is the process by which teachers provide
opportunities for pupils to achieve their potential, working at their own pace through a variety
of relevant learning activities ».
Pour sa part, Tomlinson (2004) perçoit la différenciation pédagogique comme une
façon de penser, une philosophie, qui sous-entend l’adoption de certaines valeurs et attitudes. Cette manière particulière de concevoir la pédagogie différenciée est aussi présente
chez d’autres auteurs. Caron (2003, p.80), par exemple, définit ce type de pédagogie comme
« une façon d’appréhender les différences, de vivre avec elles, de les exploiter et d’en tirer parti » et Prud’homme (2004, p.189), comme une « façon de penser l’enseignement et
l’apprentissage dans un groupe qui consiste essentiellement à construire, élèves et enseignants ensemble, des situations qui deviennent des passerelles de différentes formes donnant
accès au monde de l’apprentissage, de la participation et de l’autonomie ». À la lumière des
définitions présentées, nous pouvons dire qu’il est possible de reconnaître la pédagogie différenciée par la présence de différentes caractéristiques, à savoir l’enseignant a recours à une
variété de stratégies d’enseignement, il reconnaît les caractéristiques individuelles des
élèves, il fait face à un groupe d’élèves aux besoins hétérogènes mais aux objectifs communs, il cherche à maximiser le talent de chacun et il adopte une philosophie particulière
pour enseigner. Maintenant, il convient d’aller plus loin dans notre étude du concept de la
pédagogie différenciée en faisant ressortir les traits de cette pratique pédagogique qui nous
apparaissent les plus dominants. Nous les appelons “les idées-clés figurant dans les écrits”.
1.2. Idées-clés figurant dans les écrits
La pédagogie différenciée s’organise à partir de l’hétérogénéité des élèves. Cependant,
Astolfi (2004) souligne que pratiquer la différenciation pédagogique n’implique ni l’idée de
préparer des activités d’apprentissage différentes pour chacun des trente élèves du groupe
ni l’idée d’identifier, avec certitude, à chaque instant, la solution unique optimale pour permettre à un apprenant d’acquérir une connaissance donnée. Meirieu (2002, p.42) dirait que
l’enseignant doit chercher « un point d’appui dans le sujet, même ténu, un point où articuler
un apport, où placer un levier pour aider le sujet à grandir ». Il s’agit donc d’essayer à la fois
de respecter les différences des élèves et de permettre leur dépassement. « There is no recipe
for differentiation. » (Tomlinson, 2001, p.27.) Plusieurs théories ont été développées pour
aider les enseignants à prendre en compte la diversité dans les classes. La pédagogie diffé-
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renciée apparaît comme un concept parapluie qui permet de rassembler toutes les théories
développées pour répondre aux différences entre les élèves (Callahan, 1999). Perrenoud
(1992, p.50) affirme que cette pratique pédagogique « doit rester un paradigme général, détaché de telle ou telle modalité de réalisation ». Il prétend qu’elle peut être rendue possible autant par l’utilisation de moyens qui relèvent de la pédagogie par objectifs que de l’école active.
Prud’homme et collab. (2005) inscrivent la pédagogie différenciée dans une posture
épistémologique socioconstructiviste car, dans ce paradigme, l’apprentissage se conçoit
comme un processus dynamique. Cette perspective nous amène à traiter de l’évaluation qui
est continue et diagnostique dans une classe différenciée (Tardif, 2005; Marsolais et Brossard, 1995). L’enseignant qui pratique la différenciation pédagogique est un collecteur de
données (Brimijoin et collab., 2003). Il incorpore l’évaluation tant au début, au milieu, qu’à
la fin d’une situation d’apprentissage.
Différencier la pédagogie suppose que l’élève soit actif. À ce propos, n’y a-t-il pas une
contradiction entre un climat de classe centré sur la différenciation des apprentissages et le
fait que l’enseignant doive suivre le programme scolaire? Selon Tomlinson (2000, p.8), non
car : « Curriculum tells us what to teach : Differentiation tells us how. ». D’après Gregory et
Chapman (2002), c’est une question d’équilibre entre le devoir de travailler en fonction des
objectifs communs du programme scolaire et la réalité hétérogène du groupe d’élèves auquel
on enseigne.
Pratiquer la pédagogie différenciée peut sembler une tâche lourde. Perrenoud (1995)
et Astolfi (1998) expliquent toutefois qu’il est possible d’être en présence d’une différenciation immédiate ou d’une forme de différenciation plus ambitieuse. Tomlinson (1995) a identifié un continuum de différenciation pédagogique. Au niveau “aucune différenciation”, la
classe fonctionne comme si tous les élèves avaient les mêmes besoins. Dans le cas où il y a
de la “microdifférenciation”, des ajustements occasionnels sont effectués alors que, s’il s’agit
de “macrodifférenciation”, l’enseignement est basé sur une philosophie articulée des différences entre les élèves.
Ces idées-clés nous permettent de tracer une bonne esquisse de ce qu’est la pédagogie différenciée. Il s’agit d’une pratique pédagogique qui s’organise à partir de l’hétérogénéité
des élèves, qui se pratique de différentes manières, qui constitue un processus dynamique
d’adaptation, qui est centrée sur l’apprentissage et qui peut sembler une tâche lourde.
2. Analyse des recherches portant sur l’efficacité de la pédagogie
différenciée
En étudiant la nature de la pédagogie différenciée sur le plan de ses définitions et
des idées-clés figurant dans les écrits à son sujet, nous avons réussi à mieux comprendre
en quoi elle consiste. Cependant, le sens général de ce concept nous échappe encore et ses
modalités d’application également. « I think it’s a term that, I suppose like a bar of soap really, you try and graps it and suddently it shoots out of your hand. » (Kershner et Miles, 1996,
p.17.) Notre vision de ce type de pédagogie est donc accompagnée d’un flou. Mais peu importe la conception adoptée, la pédagogie différenciée bénéficie-t-elle d’un appui du côté de
la recherche ? Cette question est au cœur de la présente recherche.
2.1. Problématique
Comme l’expliquent Tomlinson et Demirsky Allan (2000), étant donné que la pédagogie différenciée constitue un amalgame de croyances, de théories et de pratiques, les recherches qui appuient ce type de pédagogie proviennent de diverses sources. Souvent, elles
portent sur une partie du modèle uniquement (sur les profils d’apprentissage par exemple).
Néanmoins, ces auteures soulignent qu’il est possible de trouver des rapports anecdotiques
très prometteurs écrits par des enseignants et portant sur l’utilisation du modèle en entier.
Par contre, comme elles le font remarquer elles-mêmes : « These reports, while encouraging,
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are not the carefully designed studies that are necessary to understand both positive and
negative features of applying the whole model of differentiated instruction. » (Tomlinson et
Demirsky Allan, 2000, p.30). Il est important de vérifier si l’efficacité de la pédagogie différenciée a été démontrée car c’est la réussite scolaire des élèves qui est en jeu. Dans cette
recherche, notre objectif est de vérifier si l’efficacité de ce type de pédagogie a été mesurée
empiriquement. Plus précisément, nous cherchons à identifier les effets de cette pratique
pédagogique sur la réussite des élèves.
2.2. Cadre d’analyse
Une grille d’analyse en deux volets a été utilisée pour analyser les documents. D’une
part, le modèle des trois niveaux de recherche en éducation proposé par Ellis (2001) et,
d’autre part, les critères d’analyse des recherches proposés par le U.S. Department of Education (2003). Le premier nous a permis de déterminer le seuil de validité offert par les différentes études recensées; le deuxième, qui comporte des critères d’évaluation encore plus
spécifiques, nous a permis d’examiner leur efficacité démontrée. Ellis (2001, p.20) suggère
que « it is helpful to conceptualize educational research by thinking of a model of research
with three levels, each of which has different, but related, implications for educational innovation ». Les recherches de niveau 1, ou recherches de base, sont généralement de type descriptif. Il peut s’agir d’enquêtes, d’études de cas ou de recherches réalisées en laboratoire.
Les chercheurs qui mènent des recherches de niveau 2 tentent de vérifier l’efficacité de théories données à petite échelle. La présence d’un groupe témoin et d’un ou plusieurs groupes
expérimentaux est essentielle. Les recherches de niveau 3 sont conçues pour vérifier
l’efficacité de théories données à grande échelle. L’échantillon est constitué de plusieurs
écoles ou d’une commission scolaire en entier. Le niveau des recherches en éducation détermine leur seuil de validité. Ce sont les recherches de niveau 2 et 3 qui offrent le plus haut
seuil de validité parce qu’elles se déroulent de manière plus systématique.
La procédure du U.S. Department of Education (2003) pour évaluer la rigueur de la
démonstration d’efficacité d’une pratique pédagogique se déroule en trois temps. Premièrement, il s’agit de vérifier si la pratique pédagogique est appuyée par une preuve d’efficacité
forte; deuxièmement, si elle est appuyée par une preuve d’efficacité possible; et troisièmement, dans le cas où la réponse aux deux interrogations précédentes est négative, on conclut que la pratique pédagogique ne présente aucune preuve d’efficacité significative. Une
pratique pédagogique qui est appuyée par une preuve d’efficacité forte a été expérimentée
dans le cadre d’une recherche qui remplit trois conditions : (1) on a eu recours à
l’assignation aléatoire; (2) elle a eu lieu dans au moins deux écoles ou deux classes; et (3)
elle a eu lieu dans un milieu similaire aux écoles ou classes dans lesquelles on pense appliquer la pratique pédagogique. Si l’une de ces conditions n’est pas remplie, la pratique pédagogique peut être appuyée par une preuve d’efficacité possible.
2.3. Recension des études
Nous avons d’abord procédé à une recherche générale de documents portant sur la
pédagogie différenciée en utilisant les banques de données ERIC, PsycINFO et FRANCIS. Par
la suite, nous avons sélectionné les documents portant spécifiquement sur les effets de ce
type de pédagogie en lisant les résumés des documents trouvés. Les descripteurs ainsi que
des croisements suivants ont été employés : “differentiation”; “differentiation” et “instruction”; “differentiation” et “instruction” et “achievement”; “differentiated instruction”; “differentiated teaching”; “differentiated teaching” et “achievement”; “differentiating instruction”;
et enfin, “differentiating teaching”. Une quantité totale de quatre cent dix-huit documents (n
= 418) ont été trouvés. Parmi ceux-ci, comme l’indique le tableau 1, cent quatre-vingt-neuf
documents (n = 189) ont été sélectionnés.
2.4. Seuil de validité des études
Les cent quatre-vingt-neuf documents (n = 189) sélectionnés ont été répartis de la
manière suivante : cent soixante et onze essais (réflexions, modèles théoriques, etc.); cinq
documents inaccessibles; huit recherches de niveau 1; une recherche de niveau 2; et quatre
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recherches de niveau 3. Nous avons donc trouvé treize recherches (n = 13) de niveau 1, 2 et
3. Une description de ces dernières figure dans le tableau 2.
Banque de
données ERIC
Banque de
données
PsycINFO
Banque de
données
FRANCIS
Autres
Q
77
16
6
57
156
Dissertations
2
2
-
10
14
Rapports de
recherche et
analyses
10
-
-
9
19
Documents
sélectionnés
89
18
6
76
189
Articles de
périodique
Tableau 1 : Quantité totale (Q) de documents sélectionnés
Auteur,
année et
niveau de la
recherche
Échantillon
Sujets : classe
1. Baumhétérogène
gartner et
Matière : lecture
collab.
Niveaux scolaires :
(2003)
2e, 3e et 7e primaire
Recherche de Nb. élèves : 77
niveau 1
Nb. classes : 3
Nb. écoles : 3
Sujets : élèves en
difficulté
Matières : lecture et
2. Castle et
écriture
collab. (2005) Niveaux scolaires :
Recherche de 2e à 6e primaire
niveau 1
Nb. élèves : 400
Nb. classes : non
mentionné
Nb. écoles : 1
Sujets : élèves
doués
3. Davalos et Matières : diverses
Griffin (1999) Niveau scolaire : 5e
Recherche de primaire
niveau 1
Nb. élèves : 6
Nb. classes : 6
Nb. écoles : 6
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Groupe de
comparaison
Résultats
Gr. de comparaison :
non
Assignation aléatoire :
non applicable (n/a)
Soigneusement
pairé : n/a
À la suite de l’implantation
d’un programme contenant
diverses stratégies pour
différencier la pédagogie,
une amélioration des performances des élèves ainsi que de
leurs attitudes envers la lecture
a été constatée.
Gr. de comparaison :
non
Assignation aléatoire :
n/a
Soigneusement pairé :
n/a
Le recours au “flexible grouping” pour différencier la pédagogie en lecture et en écriture a
entraîné une amélioration des
résultats des élèves en difficulté.
Gr. de comparaison :
non
Assignation aléatoire :
n/a
Soigneusement pairé :
n/a
Lorsque leur enseignant avait
recours à des stratégies
d’enseignement individualisé
pour différencier la pédagogie,
les élèves doués ont exprimé de
la satisfaction quant à leur
croissance personnelle.
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6
Sujets : élèves
doués
Matières : diverses
4. Hertzog
Niveaux scolaires :
(1997)
3e et 4e primaire Nb.
Recherche de
élèves : 11
niveau 1
Nb. classes : 2
Nb. écoles : non
mentionné
Sujets : élèves
doués
Matières : diverses
5. Hughes
Niveau scolaire : 4e
(1999)
primaire
Recherche de
Nb. élèves : non
niveau 1
mentionné
Nb. classes : 1
Nb. écoles : 1
Gr. de comparaison :
non
Assignation aléatoire :
n/a Soigneusement
pairé : n/a
L’utilisation des “open-ended
activities” comme stratégie pour
différencier la pédagogie a
amené les élèves doués à se
placer dans une situation de
confort plutôt qu’une situation
de défi. Ce type d’activité ne les
a pas motivés à travailler à leur
plein potentiel.
Gr. de comparaison :
non
Assignation aléatoire :
n/a
Soigneusement pairé :
n/a
La pédagogie différenciée a
permis de mieux répondre aux
besoins des élèves doués. Ces
derniers se sentaient en situation de défi et ils étaient engagés dans leur apprentissage. Ils
manifestaient moins de signes
d’ennui et de frustration.
Sujets : classe hétérogène
Matière : lecture
Niveau scolaire :
6. Larrivée
début de scolarité
(1981)
* Il s’agit d’une reRecherche de
vue
niveau 1
des recherches
empiriques (plus de
25 recherches ont
été examinées).
Gr. de comparaison :
non
Assignation aléatoire :
n/a
Soigneusement pairé :
n/a
Différencier la pédagogie selon
les préférences des élèves en ce
qui concerne le mode
d’apprentissage utilisé (visuel,
auditif ou kinesthésique par
exemple) ne semble pas faciliter
la réussite des élèves qui débutent en lecture.
Sujets : classe
hétérogène
Matière : technologie
7. Lemaire
Niveaux scolaires :
(2002)
4e et 6e au collège
Recherche de
(France)
niveau 1
Nb. élèves : non
mentionné
Nb. classes : 5
Nb. écoles : 1
Gr. de comparaison :
non
Assignation aléatoire :
n/a
Soigneusement pairé :
n/a
Les grands mérites de la pratique de la pédagogie différenciée en technologie au collège
ont été de faire accéder plus
d’élèves aux compétences de
base et d’avoir été plus motivante.
Sujets : élèves
doués
Matières : diverses
8. Olenchak Niveaux scolaires :
(2001)
4e, 5e et 6e primaire
Recherche de Nb. élèves : 4
niveau 1
Nb. classes : non
mentionné
Nb. écoles : non
mentionné
Gr. de comparaison :
non
Assignation aléatoire :
n/a
Soigneusement pairé :
n/a
La création d’un programme
scolaire personnalisé a permis
de répondre aux besoins des
élèves doués. Les signes
d’ennui et de frustration vis-àvis l’école ont été remplacés par
de l’intérêt de la motivation.
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9. Hall (1997)
Recherche de
niveau 2
10. Appelhof
(1984)
Recherche de
niveau 3
11. Reis et
collab. (1993)
Recherche de
niveau 3
12. Tieso
(2001)
Recherche de
niveau 3
Sujets : classe hétérogène
Matière : sciences
Niveau scolaire : 3e
secondaire
Nb. élèves : non
mentionné
Nb. classes : 2
Nb. écoles : 1
Sujets : classe
hétérogène
Matière : lecture
Niveau scolaire : 1re
primaire
Nb. élèves : non
mentionné
Nb. classes : 19
Nb. écoles : non
mentionné
Sujets : élèves
doués
Matières : diverses
Niveau scolaire : 6e
primaire
Nb. élèves : 783 Nb.
classes : non mentionné
Nb. écoles : non
mentionné
*L’expérimentation a
eu lieu dans différentes écoles faisant
partie de 27 “school
districts”.
Sujets : classe hétérogène
Matière : mathématiques
Niveaux scolaires :
4e et 5e primaire Nb.
élèves : 400 Nb.
classes : 22 Nb.
écoles : non mentionné
Sujets : élèves
doués
Matière : mathéma13.
tiques
Ysseldyke et
Niveaux scolaires :
collab. (2004) e
3 à 6e primaire
Recherche de
Nb. élèves : 100 Nb.
niveau 3
classes : non mentionné
Nb. écoles : 10
Gr. de comparaison :
oui
Assignation aléatoire :
non
Soigneusement pairé :
oui
Les tâches différenciées en
sciences n’ont mené à aucune
amélioration significative dans
le travail des élèves faibles et
ont même eu un effet démotivant considérable sur eux. Les
élèves moyens et les élèves forts
ont amélioré leurs performances.
Gr. de comparaison :
oui
Assignation aléatoire :
non
Soigneusement pairé :
oui
Après avoir encouragé les enseignants à pratiquer la pédagogie différenciée avec les lecteurs débutants, aucune amélioration générale n’a eu lieu en
ce qui concerne la réussite des
élèves.
Gr. de comparaison :
oui
Assignation aléatoire :
oui
Soigneusement pairé :
n/a
Éliminer de 40 % à 50 % du
contenu du programme scolaire
n’a pas eu d’effet négatif sur la
réussite des élèves doués. Leur
niveau de performance a été
aussi bon que sans “curriculum compacting” même que,
dans certaines matières, de
minces gains ont été réalisés.
Gr. de comparaison :
oui
Assignation aléatoire :
oui
Soigneusement pairé :
n/a
Le recours au “flexible grouping” combiné à une différenciation du curriculum a eu des
effets positifs sur la réussite
des élèves en mathématiques.
Gr. de comparaison :
oui
Assignation aléatoire :
non
Soigneusement pairé :
oui
Les élèves doués dont les enseignants avaient eu recours au
programme Accelerated Math
ont obtenu des résultats supérieurs à ceux auxquels on avait
enseigné uniquement à partir
du programme régulier de mathématiques.
Tableau 2 : Description des recherches de niveau 1, 2 et 3 trouvées (n = 13)
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2.5. Efficacité démontrée par les recherches de niveau 1, 2 et 3
Nous avons approfondi l’étude des caractéristiques des treize recherches de niveau
1, 2 et 3 trouvées en examinant l’efficacité qu’elles démontrent selon les critères du U.S.
Department of Education (2003). Huit d’entre elles ont été classées dans la catégorie “Recherche ne présentant aucune preuve d’efficacité significative”; quatre, dans la catégorie
“Recherche présentant une preuve d’efficacité possible”; et une seule, dans la catégorie «
Recherche présentant une preuve d’efficacité forte ». Nous avons deux commentaires à formuler en ce qui concerne cette classification.
Premièrement, parce qu’elles ne répondent pas aux critères du U.S. Department of
Education (2003), nous ne pouvons pas nous appuyer sur les huit recherches faisant partie
de la catégorie “Recherche ne présentant aucune preuve d’efficacité significative” pour démontrer les effets de la pédagogie différenciée. Comme nous avons analysé treize recherches,
il reste cinq recherches qui peuvent nous servir d’assise. Il s’agit des quatre recherches présentant une preuve d’efficacité possible, soit les études de Hall (1997), d’Appelhof (1984), de
Reis et collab. (1993) et d’Ysseldyke et collab. (2004), ainsi que de la seule recherche présentant une preuve d’efficacité forte, soit l’étude de Tieso (2001). Deuxièmement, faisons ressortir certaines caractéristiques importantes à propos de ces cinq recherches. Pour commencer,
dans leur étude, Reis et collab. (1993) ainsi qu’Ysseldyke et collab. (2004) se sont intéressés
à un type d’élève en particulier : les élèves doués. Ensuite, les études de Hall (1997),
d’Appelhof (1984), d’Ysseldyke et collab. (2004) ainsi que de Tieso (2001) se sont déroulées
dans des matières spécifiques. Respectivement, elles ont porté sur les sciences, la lecture,
les mathématiques et les mathématiques. Aussi, certains chercheurs ont mis à l’épreuve un
moyen en particulier pour différencier la pédagogie. Par exemple, Hall (1997) a expérimenté
les tâches différenciées; Reis et collab. (1993), le “curriculum compacting”; Ysseldyke et collab. (2004), un programme nommé le Accelerated Math; et Tieso (2001), le “flexible grouping” combiné à une différenciation du curriculum. Enfin, dans ces différentes études, on
s’est penché sur des niveaux scolaires spécifiques. La recherche de Hall (1997) s’est déroulée en troisième secondaire; celle d’Appelhof (1984), en première année au primaire; celle de
Reis et collab. (1993), en sixième année au primaire; celle d’ Ysseldyke et collab. (2004), en
troisième, quatrième, cinquième et sixième année au primaire; et celle de Tieso (2001), en
quatrième et cinquième année au primaire.
Ces caractéristiques énumérées doivent être prises en compte lorsqu’on vérifie si la
recherche se déroule dans un milieu similaire aux écoles ou classes dans lesquelles on
pense appliquer la pédagogie différenciée. Si la matière spécifique, le moyen en particulier
mis en place pour différencier la pédagogie et les niveaux scolaires ne sont pas les mêmes
dans les contextes d’expérimentation et d’application en classe, les preuves d’efficacité des
recherches peuvent se trouver affaiblies. Selon le contexte d’application, même la recherche
de Tieso (2001) qui présente une preuve d’efficacité forte d’après les critères du U.S. Department of Education (2003) pourrait donc glisser dans la catégorie “Recherche présentant
une preuve d’efficacité possible”.
Conclusion
Au terme de la présente étude, nous sommes en mesure de conclure, qu’étant donné
la petite quantité de recherches de niveau 1, 2 et 3 trouvées (n = 13), force est de constater
que peu de recherches empiriques ont été effectuées au sujet des effets de la pédagogie différenciée sur la réussite des élèves. De plus, vu la petite quantité de recherches de niveau 2 (n
= 1) et 3 (n = 4) répertoriées, soit cinq recherches au total, force est aussi de constater que
peu d’effets de la pédagogie différenciée sur la réussite des élèves ont été démontrés. Enfin,
bien que cinq recherches présentant une preuve d’efficacité possible ou forte aient été identifiées, il faut savoir que, si on prend en compte certaines de leurs caractéristiques, comme
le type d’élève auquel les chercheurs se sont intéressés, la matière, le niveau scolaire et,
dans certains cas, le moyen en particulier mis en place pour différencier la pédagogie, les
preuves d’efficacité présentées par ces dernières s’en trouvent affaiblies. Par conséquent, il
nous est possible d’affirmer que, selon les résultats de notre étude, la pédagogie différenciée
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bénéficie actuellement de peu ou pas d’appui du côté de la recherche et que prescrire cette
modalité pédagogique à grande échelle comme c’est le cas en ce moment repose sur des
preuves d’efficacité fort limitées.
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
Astolfi, J.-P. (1998). La pédagogie différenciée ou, mieux : la différenciation de la différenciation! [En
ligne]. http://www.ac-creteil.fr/maths/modulo/M9/pedaM9.html
Astolfi, J.-P. (2004). L’école pour apprendre. Paris : ESF.
Brimijoin, K., Marquissee, E. et Tomlinson, C. A. (2003). Using data to differentiate instruction.
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* Note : Pour plus de détails à propos des références relatives aux études présentées dans cet article,
veuillez consulter le mémoire de l’auteur (2007).
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