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C M YK JSL 000-TOUTES ACTUALITÉS 5 31/12/08 Le Journal de Saône-et-Loire Mercredi 31 décembre 2008 5 Saône-et-Loire Actualités CONDITIONS HIVERNALES Question d’actualité Rainer, sans abri, vit l’hiver comme une épée de Damoclès Les forces aériennes israéliennes ont lâché au moins 16 bombes hier matin, détruisant cinq bâtiments du gouvernement du Hamas. Les secouristes parlent d’une quarantaine de blessés. Selon un bilan du ministère de la Santé à Gaza, 364 Palestiniens, dont huit jeunes de moins de 17 ans, ont été tués et plus de 1.400 autres personnes ont été blessées en trois jours. A Chalon, toutes les places d’accueil des personnes sans abri sont pleines. Certains SDF continuent de dormir dehors, au péril de leur vie. Comme Rainer. S es gestes sont gourds, son regard vague, le crâne presque ras caché sous la capuche: Rainer, un vagabond allemand de 43 ans se réveille péniblement de sa nuit passée dans des couvertures sous le kiosque de la place de Beaune à Chalon, à l’abri des pluies verglaçantes mais en plein vent. Cette nuit, il a renoncé à dormir sous la tente dressée rive gauche de la Saône entre le pont des Dombes et la station d’épuration. « La toile est foutue, elle prend l’eau. Et hier, il faisait si froid que même la pâtée du chien était gelée...» Il aurait bien aimé dormir dans l’une des places ouvertes en foyer avec le plan grand froid, mais la veille, les lits de Chalon affichaient complet. «On me laisse crever...» soupire Rainer. Selon le 115 (n° d’urgence pour SDF), accueilli la veille au soir dans le fourgon du Samu social, il a refusé de quitter Chalon pour une autre commune du département où on aurait pu l’héberger. « J’aime bien Chalon, j’y ai des amis c’est plus facile » semble confirmer l’intéressé. D’autre part, c’est une faille du dispositif chalonnais, aucun des hébergements locaux d’urgence ne tolère les chiens. Et on ne sépare pas Rainer de Mezcal, son labrador noir dont il connaît par cœur la date de naissance. « Mezcal, c’est mon bébé, c’est tout ce que j’ai » dit son maître. Asthmatique, hépatique, cirrhotique... Rainer le dit sans pudeur, il a « besoin d’aide ». Pour soigner la patte blessée de son animal et pour se soigner lui-même, dit-il dans cet ordre. Il ne sait pas trop dire pourquoi sa carte européene de soins ne fonctionne pas dans le milieu médical local. Il y a bien une pharma- son asthme pour lequel il n’a plus de médicaments. Il est aussi atteint d’une hépatite C, probable souvenir d’un passé de toxicomane « j’ai arrêté la drogue il y a six mois »- et admet une cirrhose du foie. « Je ne peux pas arrêter l’alcool : en hiver, ça réchauffe ! » dit-il, ne cherchant guère à cacher la fiasque de whisky à demi vide dans sa poche. Ces signes accumulés d’une santé dégradée et les morsures répétées de l’hiver font de Rainer un candidat désigné aux futures victimes du froid et de la rubrique « faits divers » des journaux. Il le sait et confirme, « j’ai peur de mourir ». Sociable mais de plus en plus englué dans la marginalité et la maladie, Rainer rechigne à se rendre au foyer Faute d’accueil d’urgence des SDF avec chien à Chalon, Rainer vient de dormir -mal- à l’abri d’un kiosque mais à tout vent au centre ville cienne du centre ville qui lui a donné des gouttes pour soulager une persistante otite, sans grand effet. Et si ce n’était que ça... Rainer ne va pas bien. Pas bien du tout. Handicapé à une jambe depuis un acci- dent de moto en 1985 qu’il cite comme une des causes de sa longue errance, les douleurs de son ostéoporose l’empêchent de dormir longtemps. Le sol trop dur, trop froid aussi. Son épilepsie le laisse tranquille mais pas d’accueil de jour, « je crains que mon chien ne se fasse agresser par ceux des autres SDF » prétexte-t-il. Il est devenu quasi indésirable à Aurillac après avoir laissé l’appartement qui lui avait été mis à disposition et qu’il a imprudemment prêté à des jeunes SDF qui l’ont abandonné en piteux état en 2005. Rainer reconnaît sa faute, jure qu’il a retenu la leçon. Mais ne parvient pas à entrer dans le moule des accueils en foyer. Ce qui le fragilise. Son RMI allemand qui arrive à terme dans deux mois ne lui laisse pas assez d’argent. Alors Rainer invoque les Droits de l’Homme qui doivent permettre à chacun de se soigner. Pour survivre. Thierry Dromard Le 22 décembre, les lycéens de Typo se sont intéressés au travail du SAMU Social, qui redonne un peu plus que de la nourriture et une couverture aux SDF du département, exclus de notre société. Cinq sites accueillent les SDF et leur chien L e clocher de l’église Saint-Cosme sonne huit coups. Le mercure peine à monter au-dessus du zéro, mais ils sont quand même là. Éparpillés sous « le Toboggan ». Attendant patiemment le véhicule du SAMU Social. Quand il déboule sur le parking quasi désert à deux pas des rues enguirlandées et colo- rées du centre-ville de Chalon, c’est le soulagement… Ils reçoivent une couverture pour se protéger du froid. Ils se procurent des sandwiches rôtimayonnaise pour se remplir l’estomac et une boisson chaude, de quoi retrouver un brin de chaleur dans la froideur de cette soirée hivernale. « C’est comme ça de la minovembre à la fin mars, selon le temps », explique Évelyne, la tête couverte d’un chapeau péruvien aux couleurs de son SAMU social : mode d’emploi À Chalon-sur-Saône, le SAMU social est partie intégrante de la Croix-Rouge. En temps normal, le SAMU effectue ses rondes les lundis, mercredis et vendredis. Si le thermomètre passe en dessous du 0 dans l’aprèsmidi, la préfecture peut enclencher le deuxième ou troisième niveau : les tournées sont alors quotidiennes, week-end inclus. Les équipes peuvent aller de trois à six personnes, avec toujours un référent. « C’est lui qui a la responsabilité de la tournée », explique Luce, une des 35 bénévoles du SAMU social. Autre règle d’or d’une tournée : avoir toujours un minimum d’hommes dans l’équipe et ne jamais partir seul, car « on ne sait jamais ce qu’il peut se passer. », poursuit-elle. La nourriture distribuée est achetée par le SAMU social et est aussi donnée, dans le cas des sandwiches, par Daunat. Quant aux couvertures, elles sont tricotées par les « mamies de Saint-Léger-sur-Dheune, qui nous en donnent une centaine par an ! » blouson rose fluo siglé de la fameuse croix rouge. À côté d’elle, l’arrière du Boxer s’improvise salle à manger : les bénéficiaires, comme on les appelle dans le jargon officiel de la Croix-Rouge, sont assis sur des bancs de fortune, sirotant un café tout en bavardant avec le voisin. Les thermos de soupe partent vite, déversés dans des bols en plastique. Marco est l’un d’entre eux. Il est père de 5 enfants. Actuellement au RMI, il possède un appartement et parvient à joindre les deux bouts grâce aux aides financières de sa mère. Insuffisant toutefois pour pouvoir vivre correctement. « Il faut manger, non ? », déclaret-il un brin fataliste. « Le SAMU social représente beaucoup pour moi. Je peux notamment avoir un kit de toilette. Ça n’a l’air de rien, mais c’est très important. » Tout en parlant, il serre la main de ses compagnons d’infortune. « Et puis ici, il n’y a pas d’embrouilles. Tout le monde se connaît ». che lui ont valu coups et brimades dans son pays de la part de skinheads (lire ci-dessus). « C’est souvent les mêmes que l’on revoit lors de nos points fixes », poursuit Évelyne. Et souvent les mêmes qui viennent le midi à l’« accueil du jour », à côté de la Croix-Rouge, où ils peuvent aussi faire une lessive et se laver. Les bénéficiaires commencent à partir, un à un. En guise d’au revoir, certains n’hésitent pas à faire le baisemain à mesdames du SAMU Social. « Souvent les mêmes » Des liens tissés Ou presque, car trois étrangers restent incompris de tous, même s’ils sont aujourd’hui installés sur Chalon. L’un d’entre eux, Yohann, se vante d’être plus grand que les basketteurs du club local, avec ses 2 mètres 14. Enfin, c’est ce que l’on comprend : il mélange le hollandais avec des bribes d’anglais et de français. À côté de lui, Rainer est beaucoup plus calme, parlant français d’une voix posée. Il faut dire qu’il a ferraillé. Allemand d’origine, ses idées d’extrême gau- Il est neuf heures et « le Toboggan » a fini de déverser son flot de démunis. « Aujourd’hui, il y a eu plus de vingt personnes », dit Luce, une bénévole du SAMU Social. « Ils sont de plus en plus… Cela devient presque inquiétant. » Philippe et Bernard, les deux hommes de la ronde du lundi, enclenchent le démarreur crissant de la camionnette : direction le foyer de l’ADOMA, anciennement Sonacotra, perdu dans les tours du quartier des Aubépins. « On héberge ici ceux qui ont été signalés par le 115 – le numéro d’urgence mis en place par l’État dans le but d’aider les personnes en difficulté », dit Carole, le dernier larron de l’équipe. Un petit homme, qui vient de perdre à la fois son emploi de soudeur, sa femme et ses enfants, est ainsi pris en charge. On leur fait monter quatre étages pour arriver dans des couloirs impersonnels. Derrière une porte bleue, une chambre spartiate – un lit, un évier, un placard, rien de plus – les attend pour la nuit. Le véhicule blanc du SAMU offert par les Autoroutes Paris Rhin-Rhône reprend les routes de la sous-préfecture de Saône-et-Loire. Sur le trajet, les bénévoles ressassent leurs souvenirs. « Il a fallu l’apprivoiser celui-là… », « Il est vraiment gentil, lui… », « Elle était seule et… », « Attention, celuici pouvait devenir dangereux… » Nostalgie, quand tu nous tiens… Car, au rythme des tournées, des liens de sympathie se sont tissés. Alexis Hontang Hervé, une vie dans la rue Hervé vit dans la rue depuis l’âge de 10 ans. Aujourd’hui âgé de 26 ans, il dénonce « un système de gaspillage », tout en restant lucide sur sa situation personnelle. Si Hervé est là aujourd’hui, c’est parce qu’il a mené « une vie en dents de scie ». Originaire de Reims, le jeune homme a commencé à arpenter les rues dès l’âge de 10 ans avec sa mère SDF, à boire sérieusement à 15 ans. « J’ai voulu faire un BEP vente, mais quand on est SDF, c’est très difficile de suivre ses études. J’ai eu un travail dans le commerce, mais je ne supportais pas de sourire aux gens pour leur vendre n’importe quoi ». Hervé a aussi un enfant, « qui vit bien avec sa mère qui, elle, a un domicile ». Le jeune homme ne s’accable pas sur son sort, bien loin de là. « C’est une question difficile ! Dans ce conflit on a l’impression que cela ne s’arrêtera jamais. Il semble que ce soit surtout de graves divergences au niveau des cultures religieuses entre les deux pays qui en est la cause. Mais est-ce que l’on nous dit tout, aussi bien à la TV que dans les médias ? Et puis, il y a tellement d’autres conflits dans le monde que l’on perd un peu nos repères... Surtout au moment des fêtes. C’est dommage car il y a de gens qui meurent et d’autres qui souffrent » C’est un paradoxe que de détenir un chien pour bénéficier d’un peu de compagnie -et Dieu sait que dans leur solitude les SDF en ont besoin- mais de s’en trouver écarté de celle des hommes. Néanmoins, cinq villes de S.-&-L. disposent de places d’accueil de SDF avec chien. L’animal dort soit dans la chambre avec son maître soit dans un chenil attenant: Mâcon, Louhans, Montchanin, Chauffailles, La Clayette. Le SAMU social au chevet des pauvres Le SAMU Social fait régulièrement le tour des endroits où se réfugient les SDF et passent un moment de chaleur avec eux « Est-ce que l’on nous dit tout? » Il a de quoi être enragé envers la société. Mais, ô surprise, il reste d’une lucidité implacable quand on évoque sa situation. « C’est vrai que la Société n’aide pas toujours. On nous dit d’aller voir les assistantes sociales. Mais il faut telle démarche, remplir tels papiers… Ça prend trop de temps et, en attendant, on est toujours dans la rue… Mais bon, il y a eu des moments où j’ai voulu m’en sortir seul ». Hervé préfère garder ses reproches envers un autre fléau de la société. « Le gaspillage est vraiment énorme. Parfois, je fais des tours dans les boulangeries, histoire de récupérer les invendus. Les gens préfèrent jeter cette nourriture au lieu de la donner aux plus démunis ! » Aujourd’hui, Hervé vit dans un squat avec trois autres personnes et son chien. M. Tienne, fonctionnaire, Germagny « Il n’y a plus de réflexion, il n’y a plus de recul, mais après il y a la vengeance » LES CHEVALIERS DES NUITS FROIDES D’HIVER Page 115 Comprenez-vous le conflit israëlo-palestinien ? « Mon chien fait partie de ma famille. Il apporte de la tendresse et de la sécurité », poursuit-il. Il parvient à joindre les deux bouts en mendiant dans les rues piétonnes. Avec son amie, ils se font une trentaine d’euros par jour. « Les gens sont parfois dédaigneux. Mais quand d’autres viennent nous parler, cela fait toujours plaisir. » La misère n’a pas encore ruiné son esprit. Il s’imagine un avenir meilleur. « Ouvrir un hôtel est mon rêve ». Ironie de l’histoire, il ne peut même pas louer une chambre dans ces lieux, les animaux n’étant pas acceptés. Sur sa casquette, plusieurs badges sont accrochés. Dont un sur lequel est inscrit un grand « HOPE » - espoir. Tout un symbole. Alexis Hontang Fabien Ruggieri, 42 ans, commerçant, Mâcon « Je pense que quand il y a de la religion dans un conflit, il n’y a plus de raison, et que tous les actes sont régis par quelque chose qui dépasse largement la condition humaine. La religion est une chose qui enlève toute réflexion et tout recul sur les événements, et ça dure depuis la nuit des temps - et on en a encore pour quelques années je le crains... Et après il y a la vengeance ! Tous ces actes pour la religion appellent un acte de vengeance : on n’en verra jamais le bout ! » « On a l’impression qu’Israël a attendu le feu vert d’Obama pour agir » « Pour le comprendre, il faut revenir aux origines du conflit, c’est à dire en 1967 date de l’occupation des territoires palestiniens par Israël. Il ne faut pas oublier qui est le premier agresseur. Depuis la haine s’est instaurée entre les deux peuples et elle est là pour plusieurs générations. Ce qui est inquiétant, c’est que l’Amérique , voire l’Europe prennent partie pour Israël. On a l’impresCyril, 39ans, sion qu’Israël a attendu le employé de bureau, feu vert d’Obama pour agir. Saint-Vincent-deCe conflit récurrent est un Bragny danger. » PERMIS DE CONDUIRE Dates des prochains stages de récupération de points L’Automobile Club de Bourgogne informe qu’un stages de 2 jours permettant de récupérer un maximum de 4 points auront lieu les lundi 12 et mardi 13 janvier dans les locaux de Campanile Hôtel Grill à Chalon-sur-Saône. Ce stage n’est pas un examen, mais une action de sensibilisation à la sécurité routière. Pour tous renseignements et inscriptions contactez immédiatement et même le week-end : Automobile Club de Bourgogne - Tel 03.80.60.09.70 ou 06.09.23.32.02 (répondeur).