Download Une poétique du brouillon *
Transcript
1 Une poétique du brouillon * On a toujours dû faire des brouillons – plus facilement, sans doute, depuis l’arrivée du papier. Une fois l’œuvre achevée, on les laissait se perdre. Mais à une certaine époque, on s’est mis à les conserver, leur reconnaître un intérêt, les garder comme souvenir, les constituer en archives. L’histoire d’une pensée ou d’une création a pu paraître faire partie de cette pensée ou de cette création, contribuer à sa valeur. C’est au XVIIIe siècle qu’est apparu, dans ce domaine comme dans bien d’autres, le souci historique. L’objet de cette étude est de montrer les suites possibles d’une telle escalade. Première étape : si l’histoire d’une pensée est intéressante, l’ordre de son élaboration doit être conservé. Et comment le faire autrement qu’en datant ? À partir de la seconde moitié du XVIIIe siècle, la forme journal s’est trouvée plus souvent employée pour le travail intellectuel. Elle était déjà courante pour les notes de lecture (références, citations et commentaires) et les observations scientifiques, elle s’est étendue aux pensées personnelles et à leur progressive élaboration. Le journal a pu devenir le laboratoire d’une œuvre. Deuxième étape : si la valeur d’une pensée tient à l’authenticité de son histoire, à ses jaillissements, enchaînements et métamorphoses, ne va-t-on pas tout gâcher en la recadrant dans un moule classique ? Faut-il livrer au lecteur un produit fini ? Ne vaut-il pas mieux le mettre directement devant cette pensée en mouvement, dont il prendra le relais ? Un nouveau pas est franchi : l’œuvre est abandonnée, et le journal-laboratoire prend sa place. Cette escalade, apparemment fort moderne, vers une « poétique du brouillon » n’est certes pas fréquente. En voici pourtant quatre exemples, datant des dernières décennies du e XVIII siècle : les chantiers (fiches, carnets, journaux) de Georges-Louis Le Sage (1724-1803), Louis-Claude de Saint-Martin (1743-1803), Joseph Joubert (1754-1824), et Pierre-Hyacinthe Azaïs (1766-1845), un savant, un mystique, un littérateur, un philosophe, quatre intellectuels qui ont préféré, rêvé ou subi, soit pour l’ensemble de leur travail, soit pour une partie, l’inachèvement. Ils sont restés au seuil de l’œuvre, laissant aux disciples à venir le soin de se débrouiller comme ils pourraient avec ce qu’ils laissaient derrière eux : la pensée ou l’écriture en train de se faire. Ces quatre « cas » sont fort différents les uns des autres par le projet et, il faut bien le dire aussi, par le talent. Le Sage et Joubert ont été entourés d’amis ou disciples qui les pressaient de faire un livre : leur refus était vu autour d’eux, et peut-être parfois vécu par eux, comme une déficience. Un seul des quatre est capable d’atteindre vraiment un lecteur d’aujourd’hui, c’est Joseph Joubert, mais il n’y parvient qu’à condition de n’être pas lu directement dans le texte, j’y reviendrai : à sa manière, il est aussi « illisible » que les autres. Ces quatre originaux semblent droit sortis d’un roman de Perec, ils sont dignes d’habiter au 11 bis rue Simon-Crubellier, dans l’immeuble de La Vie mode d’emploi. J’ai même trouvé à Joubert un faux air de Bartleby : à ses amis qui le pressaient d’achever au moins un ouvrage, il répondait qu’il le ferait « quand il serait grand » – ce qui rappelle la célèbre réplique du héros de Melville : « I would prefer not to » (« J’aimerais mieux ne pas »). Je ne céderai pas ici à la tentation de les imiter (quoique je l’aie fait jadis, ayant proposé, dans Le Moi des demoiselles (Seuil, 1993), le journal du livre que j’avais renoncé à * À paraître dans les Actes du colloque « Les journaux d’écrivains : questions génériques et éditoriales », Grenoble, 21-‐23 octobre 2010 2 écrire). Pour l’historique de ma recherche sur les Origines du journal personnel (France, 1750-1815), je renvoie à mon site « Autopacte ». Sur ces hommes prolixes, qui ont déplié l’éventail de leur pensée, je serai donc bref, ne pouvant offrir de chacun d’eux qu’un médaillon ramassé. Saint-Martin et Joubert sont connus, ils ont leurs exégètes. Azaïs a son portrait dans « Autopacte », et j’y ferai bientôt celui de Le Sage. Fascinants, ces adeptes du brouillon sont en même temps contagieux : avec eux, on pourrait se laisser aller à ne jamais finir. * Georges-Louis Le Sage (1724-1803), Genevois, homme de sciences, homme des Lumières, auteur de théories sur la pesanteur, sur les causes finales, inventeur aussi, a mené une vie professionnelle très active (opuscules, articles, correspondances, etc.), mais sans jamais arriver à présenter son travail sous la forme de livres. Cette incapacité à « finir », jointe à la curiosité qu’il avait pour le fonctionnement de son esprit (il voulait écrire, non une psychologie, mais une « noogonie » ou « noogenèse »), l’a amené à concevoir différents projets d’éditions commentées et génétiques de ses travaux scientifiques ; mais le travail pour ces anthologies s’est à son tour perdu dans la prolifération de versions successives, brouillons, réflexions « noologiques », chaque acte se trouvant scrupuleusement daté sur une fiche (il se servait de cartes à jouer), fiches progressivement classées en sachets avec des suscriptions, sachets eux-mêmes classés dans des boîtes, fiches et sachets accumulant les variantes et les redites entre lesquels il n’arrivait pas à choisir. Ce travail gigantesque l’a amené à glisser du premier degré (projet de rassembler ses découvertes scientifiques) au second degré (projet de peindre l’histoire de son esprit), puis au troisième degré (établir sur le plan théorique l’intérêt et la légitimité de l’acte autobiographique). Il est mort inédit, laissant à son disciple Pierre Prevost (qui n’en fit rien) la consigne de publier toutes ses fiches ! Elles sont 35 000 environ, conservées à la Bibliothèque de Genève. C’est le passionnant, mais épuisant, journal de l’autobiographie qu’il n’a pas écrite. Jusqu’à présent seules trois personnes se sont penchées sur ce gisement monstre : Pierre Prevost, qui en 1805 consacra une biographie à son maître et réédita certains de ses opuscules ; Bernard Gagnebin, qui en 1960 reconditionna dans de nouvelles boîtes les fiches ; et Luc Weibel, qui en 1997 fit le portrait de Le Sage et réalisa une petite anthologie. Peut-être d’autres curieux se sont-ils aventurés à la Bibliothèque de Genève pour explorer cette soixantaine de boîtes, ces centaines de sachets, ces milliers de fiches. Ils ont dû, comme moi, être fascinés et épouvantés. Pour l’instant (j’écris ceci le 30 janvier 2011), j’ai passé deux jours à répertorier et explorer les quatre premières boîtes (2 000 fiches environ) où semblent regroupés la plupart des éléments concernant son projet autobiographique révolutionnaire. On est frappé par le contraste entre le souci scrupuleux de méthode, la minutie des classements et la réalité d’une accumulation sans fin de notes répétitives qui se chevauchent. Lui-même, plein de lucidité, de modestie et d’humour, voyait le problème. Voici par exemple le texte d’une fiche du sachet 50 de la deuxième boîte : « Titres que je pourrai donner à mes ouvrages pour me mettre à l’aise sur leurs imperfections : Ébauche ou Esquisse, Fragments ou Démembrements, Matériaux ou Préparatifs, Plans ou Projets, Aperçus ou Vues, Chaos ou Fatras ». Sur une autre fiche du même sachet, il enfonce le clou : « Bégaiements, Tâtonnements, Défrichements, Pensées hasardées, Fragments comme posthumes ». Les fiches sont assez souvent datées. À l’intérieur de certains sachets, elles sont rangées en ordre chronologique. Par exemple, dans la première boîte, les sachets 31 et 32 regroupent 69 fiches qui permettent de suivre au jour le jour, de 1792 à 1799, tous les changements (projetés !) de titres et de plans de différents ouvrages (virtuels !), comme les Notices littéraires et 3 psychologiques sur un philosophe et sur son fils, ou la Succession des pensées et des écrits de Georges Le Sage. Sur les sachets, il indique souvent si les fiches sont « datées » ou « non datées ». Et il a des réflexions d’une grande justesse, et d’une modernité toute « génétique », sur l’importance de cet ordre chronologique : Utilité de conserver les Dates précises, dans un ouvrage principalement destiné à décrire la génération successive de certaines pensées. C’est que la moindre transposition, qui intervertirait l’ordre de ces pensées altérerait beaucoup l’idée juste que le lecteur veut se former de l’influence qu’elles ont eue les unes sur les autres. On risque de tomber dans une telle transposition quand on n’indique une de ces dates que par sa place indéterminée entre deux autres. Parce qu’il peut nous survenir ensuite la connaissance précise de la date d’une quatrième pensée et qu’alors (si l’on néglige de conserver la date précise de la pensée intermédiaire) on ne saura pas si elle a précédé cette 4ème ou si elle l’a suivie. (2ème boîte, sachet 65) Mais si les fiches sont datées, et parfois classées chronologiquement dans les sachets, ceux-ci sont répartis thématiquement. L’écriture de Le Sage ne s’inscrit pas dans le fil d’une chronologie linéaire, mais dans un foisonnement de séries parallèles qui se chevauchent. Luimême s’y perdait : Ce 29me juin 1772. J’ai vu évidemment de nouveau que je devais traiter comme l’emploi le plus utile de mon temps le débrouillement de mes papiers. Par où j’entends : de les trier, classer, étiqueter, enregistrer, abréger ou développer, corriger ou mettre au net, détruire ou faire transcrire. (2ème boîte, sachet 46) Comme je compte mes papiers et cartes par centaines et milliers ; que dans le même mois je travaille sur plusieurs douzaines de sujets différents ; et que mon cabinet est des plus étroits : j’ai beau avoir de l’ordre, je m’égare encore à tout moment, dans cette immensité, cette multiplicité et cet entassement. Cela me fait perdre beaucoup de temps à chercher, et m’oblige souvent à me répéter. (cité par Pierre Prevost, op. cit., p. 77) Derrière ce problème d’ordre s’en cache un autre, plus fondamental : son incapacité à choisir, son dégoût de terminer : en somme, son amour du brouillon. Il aime varier, changer, accumuler, rectifier. A-t-il pu, dans l’exploration de ses souvenirs d’enfance, trouver l’origine de ce trait de caractère, comme Rousseau remontant la « chaîne de ses affections secrètes » ? Je suis trop peu avancé dans l’exploration des fiches pour le dire. Mais il met tout son talent et son humour à le décrire : L’une des causes pour lesquelles j’ai tant de peine à finir mes principaux ouvrages, c’est que je me disperse sur une centaine d’autres objets. J’ai bien cherché quelquefois à chercher des remèdes contre ce mal : mais cette recherche savait devenir elle-même un cent et unième objet de distraction. (1ère boîte, sachet 40) Il m’arrive souvent de recueillir des traits qui me viennent à l’esprit ou que je trouve dans mes lectures, et de les placer sans examen dans les logettes où j’ai déjà rassemblé des choses relatives au même sujet, non dans la persuasion que ce soit ce qu’il y a de mieux sur le même sujet, ni dans le dessein formel d’en faire usage, mais seulement pour avoir un plus grand choix, soit pour le fond, soit pour l’expression. Quand ensuite je viens à revoir cette petite collection, j’oublie que je ne m’étais point proposé d’en employer tous les matériaux, et je me tue de peine pour les mettre tous en œuvre. (1ère boîte, sachet 41) 4 Dans la composition de mes ouvrages, je ressemble un peu à un enfant insatiable, qui demandait alternativement plusieurs fois : encore un peu de pain pour achever son fromage, et encore un peu de fromage pour achever son pain. (2ème boîte, sachet 80) Comment le lecteur va-t-il réagir devant cet immense brouillon en miettes ? La première tentation est de prendre le relais : à nous de terminer, à nous de sculpter l’œuvre géniale dont nous discernons les linéaments dans ce chaos. Nous sommes sans doute devant une autobiographie intellectuelle très remarquable. Elle a tout un pan affectif et sentimental que je n’ai pas encore eu le temps d’explorer : des séries de sachets « antigames » (contre le mariage) prônant l’amouritié. Ce goût pour les mots-valises, pour les néologismes, pour les listes révèle aussi en lui une sorte de poète. On croyait le mot « autobiographie » importé en français de l’allemand et de l’anglais dans les années 1820. Le Sage, dès les années 1790, en a eu besoin et l’a inventé (boîte 4, sachet 12, « Mélanges sur les autobiographes »). Disciple de Marc-Aurèle, de Montaigne et de Rousseau, Le Sage a construit une vraie théorie et apologie de l’autobiographie, restée inconnue au fond de ses sachets. À nous de choisir, d’organiser, et de révéler au monde qu’existait, en cette fin de e XVIII siècle, à côté de Rousseau et de Rétif, un troisième grand autobiographe, Le Sage. Un seul bémol : ce qui lui manque peut-être, c’est l’art de raconter. Mais ceci n’est qu’un rêve tant qu’on n’aura pas inventorié et transcrit l’essentiel de ce chantier, et qu’on ne se sera pas appliqué à en discerner de plus près la genèse. Il y en a pour des années, et ce devrait être un travail d’équipe. Cela en vaut-il la peine ? Ces deux journées – c’est bien peu – de tête-à-tête avec les fiches m’ont fait passer par des alternances d’enthousiasme et de découragement. Mais je reprenais moral en maniant ces toutes simples cartes à jouer utilisées comme fiches, où l’écriture noire, passant au verso, chevauchait impavide cœurs et carreaux, mais contournait prudemment piques et trèfles. Malgré tout, avec ces cartes, il nous reste peut-être une belle partie à jouer. * Louis-Claude de Saint-Martin (1743-1803), dit (par lui-même) « le philosophe inconnu », déiste, spiritualiste, anticlérical, théosophe, franc-maçon, a publié entre 1775 (Des erreurs et de la vérité) et 1802 (Le Ministère de l’homme-esprit) une bonne douzaine d’ouvrages. Dans sa jeunesse, il avait composé un Livre rouge, demeuré inédit, où il consignait en les numérotant aphorismes ou notations d’idées. Il les consignait sur des feuilles volantes ou sur des cahiers. Certains de ses ouvrages, comme De l’esprit des choses (1800-1801), ne sont, de son propre aveu, « qu’un rassemblement des notes nombreuses dont mes portefeuilles sont pleins, parce que j’ai eu soin d’écrire à peu près tout ce qui m’est venu. Les amis de la vérité ont beaucoup goûté cet ouvrage. Les gens du monde y ont trouvé de la négligence dans l’ordonnance et dans le style » (Mon portrait, n° 986). Beaucoup d’intellectuels de l’époque avaient ainsi des portefeuilles de notes de lecture et de réflexions personnelles, mais ne les publiaient pas tels quels. En donnant ses pensées en vrac, sans vrai élagage ni organisation, Saint-Martin établit une sorte d’équation entre désordre et vérité et se réfugie derrière l’approbation de lecteurs éclairés, avant-garde qu’il oppose à la routine des gens du monde. En 1789, à 46 ans, il se lance dans une entreprise originale : un autoportrait sous forme de notes numérotées (cela ira jusqu’à 1138) et de loin en loin datées. Seule sa mort en 1803 mettra fin à l’entreprise. Ce n’est pas un journal au sens habituel (les dates sont clairsemées, il 5 ne s’agit pas de suivre le fil de sa vie présente), mais c’est tout de même un journal, celui de son autoportrait et de son autobiographie. La numérotation remplit la même fonction qu’une datation : fixer le texte des notes dans un ordre ne varietur, interdire les retouches ou recompositions ultérieures, imposer l’ordre d’écriture comme ordre de lecture. Comme dans les journaux où l’on écrit par provision la date du lendemain en terminant l’entrée du jour, Saint-Martin écrit chaque fois le numéro de l’entrée suivante : 1138 est resté vide, il était mort. Ce journal reflète-t-il un travail de recherche sur soi, l’image qu’il se fait de lui bouge-telle au fil du temps ? Guère, semble-t-il. Entrepris en pleine maturité (peut-être après sa rencontre avec les œuvres de Jakob Böhme et la lecture de la Seconde Partie des Confessions de Rousseau), c’est le journal de quelqu’un qui entretient une identité sur laquelle il n’a guère de doute. Il s’agit pour lui d’en dégager toutes les facettes, de la nourrir de nouveaux souvenirs, aperçus, lectures, rencontres : on sent qu’il a plaisir à être en compagnie avec luimême. Il ne s’est exprimé que deux fois sur ce projet, chaque fois en insistant sur le caractère définitif de l’ordre, c’est-à-dire du désordre, apparent. Ce n’est pas un travail préparatoire à la rédaction d’un autoportrait ou d’un récit de vie. Ce sont le portrait ou le récit eux-mêmes. Le brouillon est l’œuvre. La première fois, c’est lorsque, l’entreprise étant sans doute déjà bien avancée, il lui donna un titre, que voici : Mon portrait historique et philosophique, commencé en 1789 et continué sans suite, et sans autre ordre que celui dans lequel ma mémoire m’a retracé les événements de ma vie et les pensées que j’ai reçues en différents temps. Quoique Saint-Martin se compare souvent à Rousseau, ce titre fait plutôt penser à Montaigne ou à Stendhal (ou alors au Rousseau des Rêveries qui prétend tenir un « journal informe » – mais on sait combien cette annonce est trompeuse, rien n’est plus composé que le texte des Rêveries). La seconde fois, le projet est commenté à l’intérieur du texte. Il ne s’agit pas d’une déclaration initiale, mais d’une remarque faite en passant, en 1793 : 352 Je ne me suis laissé aller à composer de pièces et d’idées détachées ce recueil historique moral et philosophique que pour ne pas perdre les petits traits épars de mon existence, ils n’auraient pas mérité la peine de faire un ouvrage en règle, et je ne donne à ce petit travail que des minutes très rares et passagères, croyant devoir mon temps à des occupations plus importantes. Le vrai avantage qu’il me procurera c’est de pouvoir de temps à autre me montrer à moi-même tel que j’ai été, tel que j’aurais voulu être et tel que je l’aurais pu si j’eusse été secondé […]. (Mon Portrait, n° 352) Robert Amadou, en publiant ce texte en 1961, s’est longuement interrogé pour savoir si Saint-Martin écrivait pour lui seul ou pensait au public. La réponse semble claire : pour lui seul, tant qu’il est en vie – c’est le jardin secret où il cultive son moi, à l’abri des regards ; pour ses amis et disciples, après sa mort, comme témoignage de ce qu’il aura été. Son souhait, en tout cas, était que le texte soit donné tel quel. Après sa mort, ses héritiers publièrent deux volumes d’œuvres posthumes, et dans l’un d’eux, le Portrait, réduit à 295 articles (un quart de l’original), altérés ou abrégés, mais en respectant l’ordre et la numérotation d’origine (du coup bizarrement trouée). La raison alléguée était la discrétion due à des personnes vivantes : en fait, il s’agissait surtout d’édulcorer et de banaliser la figure d’un anticonformiste gênant. Peut-être aussi de supprimer ce qui apparaissait comme des redites. Le manuscrit, qui avait circulé dans les ventes 6 publiques tout au long du XIXe siècle avant qu’on ne perde sa trace, a été retrouvé après une longue traque par Robert Amadou, et publié intégralement par lui en 1961. Il serait passionnant d’étudier le rythme de ce texte volontairement décousu, qui titube entre autoportrait, carnets de notes, récit de vie, mais dont la composition apparemment aléatoire obéit sans doute à des régularités. Un brouillon ne peut-il être, à sa manière, un « ouvrage en règle » ? Il s’agirait alors, simplement, d’une nouvelle règle… * Joseph Joubert (1754-1824) est apparemment un écrivain sans œuvre. Il n’a publié de son vivant que de brefs articles ou essais. Il n’a laissé à sa mort aucune œuvre publiable. Mais il avait pris des notes, toute sa vie ou presque, sur des petits carnets, au nombre de plus de deux cents, et sur des feuilles volantes. Et comme il dit tout, rapidement et fort bien, mieux vaut d’abord lui laisser la parole. Anthologie : Je suis propre à semer, mais non pas à bâtir et à fonder. (16 décembre 1801) Si je m’appesantis, tout est perdu. (22 avril 1802) Peut-être est-il vrai que l’esprit du lecteur aime à achever et qu’il ne faut lui donner que ce qu’il faut pour achever facilement et être rappelé de lui-même à l’ouvrage, etc. Je finis trop. (17 juillet 1802) Jusqu’à ce que la goutte de lumière dont j’ai besoin et que j’attends soit formée et tombe de là. (23 décembre 1804) En toutes choses, il me semble que les idées intermédiaires lui manquent ou l’ennuient trop. – C’est de moi que je parle. (5 novembre 1805) Il y a des esprits ruminants et j’en suis un. Il faut que tous mes sucs passent par ma double poche. (10 novembre 1805) Je suis comme Montaigne, « impropre au discours continu ». (14 janvier 1808) Je suis, je l’avouerai, comme une harpe éolienne, qui rend quelques beaux sons, mais qui n’exécute aucun air. (13 janvier 1815) Tourmenté par la maudite ambition de mettre toujours tout un livre dans une page, toute une page dans une phrase et cette phrase dans un mot. C’est moi. (8 février 1815) Il se refusa toujours à suivre les conseils de ses amis, comme Fontanes, qui lui écrivait le 22 juillet 1803 : « Je vous exhorte à écrire tous les jours, en rentrant, les méditations de votre journée. Vous choisirez, au bout de quelque temps, dans ces fantaisies de votre pensée et vous serez surpris d’avoir fait, presque à votre insu, un fort bel ouvrage ». À sa mort en 1824, voici ce que trouvèrent ses héritiers (description faite par Paul de Raynal dans l’édition de 1842) : Les manuscrits de M. Joubert se divisaient en deux parties distinctes : d’un côté des feuilles détachées, couvertes d’ébauches et jetées sans ordre dans quelques cartons ; de l’autre une suite de petits livrets, au nombre de plus de deux cents, où il avait inscrit, jour par jour, ses réflexions, ses maximes, l’analyse de ses lectures et les événements de sa vie. Cette dernière partie, véritable journal que, pendant plus de trente années, madame Joubert avait vu aux 7 mains de son mari, était la seule dont elle eût jugé nécessaire de réunir les éléments. Mais les pensées n’y sont écrites qu’au crayon ; des renvois, des lacunes, des abréviations fréquentes, un inexprimable désordre en rendent l’intelligence, la lecture même extrêmement pénibles. Souvent la phrase n’est qu’indiquée ; la conséquence arrive sans les prémisses ; le trait est lancé vers un but inconnu. Souvent, en relisant d’anciens cahiers, l’auteur complète ou modifie sa pensée sur le livret courant, sans retoucher aux mots passés, sans indiquer la relation des mots présents. Il écrit le jour, il écrit la nuit. Au lit ou debout, dans son cabinet ou dans ses promenades, à pied ou en voiture, il a toujours avec lui son petit crayon d’or, son petit cahier, et ses impressions y sont consignées avec une constante qui ne se dément jamais, mais sans suite, sans prétention, sans le moindre souci d’un regard étranger. Ainsi s’étaient amassées d’immenses richesses que ne devait jamais mettre en œuvre la main qui les avait rassemblées. « Mes idées ! » s’écriait M. Joubert, « c’est la maison pour les loger qui me coûte à bâtir ! ». Elle lui coûtait tant qu’il ne la bâtit pas. Le projet de Joseph Joubert était pour Paul de Raynal, en 1842, une énigme. Mais il n’est pas le seul. Presque toute l’histoire du texte a été, depuis deux siècles, celle d’un combat épuisant pour le faire entrer dans la forme « livre » qu’il refusait. Résumons : il y a eu trois phases. De 1842 à 1938, pendant un siècle, Joubert a été un moraliste. À partir de ses carnets, ses héritiers ont publié ses Pensées. Ils ont trié (en éliminant beaucoup), effacé toutes les dates, classé par thème. Joubert a pris place dans la lignée des grands « penseurs », auteurs d’aphorismes. En 1938, Joubert est devenu un diariste. L’édition chronologique d’André Beaunier restitue (apparemment) le texte exact des carnets, et nous voilà devant un nouveau Joubert : ses pensées et ses phrases sont dans l’ordre de leur écriture, les dates ne sont plus gommées, les thèmes mélangés et entrelacés comme ils étaient dans les Carnets. Est-ce enfin le vrai Joubert ? Il est « vrai » en ce sens qu’il est immense (deux volumes, près de mille pages serrées) et diffus : les perles sont perdues dans le tout-venant de notes parfois tâtonnantes. Si cette édition décourage la lecture, elle donne à chacun l’envie et la possibilité de refaire à sa manière le travail anthologique. S’y sont essayés en 1941, Mgr Grente, en 1954, Raymond Dumay, en 1966, Georges Poulet et en 1989, Rémy Tessonneau. Les deux derniers ont choisi des solutions opposées : Poulet suit l’ordre chronologique, tout en estompant les dates, et il construit un Joubert poète et platonicien ; Tessonneau classe par thème les performances d’un penseur universel (revenant à ce qu’on avait fait à partir de 1842). À quoi s’ajoutent de petites anthologies qui proposent des Joubert de poche, surtout poète ou mystique. En 1996, coup de théâtre (discret). David Kinloch et Philippe Mangeot publient une édition diplomatique de 4 des 200 carnets. Pour la première fois leur transcription révèle la réalité graphique des carnets : Joubert devient un artiste. Un calligraphe. Il a en quelque sorte dessiné, sculpté, mis en page sa pensée. Aucune des éditions antérieures ne donnaient à voir un fac-similé des carnets. Celle-ci ne le fait pas non plus, d’ailleurs, mais permet de les imaginer. Est-ce, comme le disait Paul de Raynal, un « inexprimable désordre » ? Non. Mais reconnaît-on là le texte lissé et peigné par André Beaunier ? Non plus. C’est tout à fait autre chose : une danse de l’écriture, dont la transcription diplomatique donne la géométrie, mais laisse échapper le mouvement et le charme. Peut-on encore parler de « brouillon » ? Le mot ne convient guère. En amont, on devine une longue élaboration muette : ce qui est déposé sur le papier est le produit d’une distillation. En aval, aucun projet de regroupement ou d’utilisation. Néanmoins beaucoup d’essais, de redites, de tâtonnements, d’amorces suspendues. On en arrive à l’idée qu’on a sous les yeux les traces laissées par une sorte d’exercice spirituel. Et que l’œuvre produite par ce travail, c’est Joubert lui-même : l’homme discret et brillant à la fois, profond, que ses amis admiraient tant. Mais comment le fréquenter 8 à notre tour ? C’est un sentiment magique qu’on éprouve lorsque, comme à l’issue d’une quête initiatique, on se trouve admis à tenir entre ses mains les petits carnets (ils sont de format 9 x 15 cm), à les retourner (ils sont écrits en tous sens), à réfléchir à leur « scénographie » (des astérisques, d’innombrables feuilles de laurier, scandent le texte, isolant peut-être les formulations les plus abouties ?), à suivre leurs dates, à imaginer dans quelles circonstances le crayon, parfois pâli, a laissé ces traces. On devine l’instant, la main, le geste, le corps, la poche. Ces deux cents carnets, dont il n’a rien fait, mais qu’il a faits, il avait une peur affreuse de les perdre : certains commencent par une promesse de récompense à qui les lui rapportera s’il les égare. Petits, écrits au crayon, ils étaient destinés à l’accompagner dans la vie quotidienne, non point pour noter celle-ci, qui n’y apparaît guère, mais pour saisir au vol, quand elles arrivaient à maturité, ses pensées, ou noter ses intuitions. Les relisait-il ? Sans doute pour le proche présent : la pensée parfois rebondit, se fait écho, et c’est le fil invisible du temps qui relie ces perles. Mais sans idée de remise en ordre ni de totalisation. David Kinloch et Philippe Mangeot suggèrent l’idée d’un « livre manuscrit », mettant en question le statut de l’écriture pour Joubert : celui-ci, pour employer les distinctions de Nelson Goodman, jouerait, pour l’écriture, sur la tension entre son naturel statut « allographique » (partition qui n’existe que dans l’exécution par un autre) et le statut « autographique » (œuvre dont toute reproduction serait une altération). En tout cas on est devant un paradoxe : plus la transcription est fidèle, plus elle est « illisible » ! Mais en même temps, cette approche suscite un puissant désir de mettre de l’ordre, de s’approprier pour transmettre. En s’arrêtant toujours à mi-chemin, Joubert provoque son lecteur à prendre le relais. Il reste dynamique, inspirateur. Il est, aujourd’hui encore, effervescent. * Pierre-Hyacinthe Azaïs (1766-1845), musicien, philosophe, auteur d’un livre qui eut son succès, Des compensations dans les destinées humaines (1809), fut surtout passionné par la pratique du journal intime. De 1811 à sa mort, pendant trente-quatre ans, il tint un « journal anniversaire », composé de 366 journaux, un pour chaque jour de l’année. Aujourd’hui conservé aux Archives du Tarn, ce journal a été révélé et étudié par Michel Baude, mais est resté inédit. Dans sa jeunesse, de 1797 à 1803, Azaïs composa un journal « classique », mais destiné à la lecture, même s’il dit parfois ne l’écrire que pour lui, journal que nous ne connaissons que partiellement par des copies (Bibliothèque de l’Institut). Entre autres originalités, afin de coller le mieux possible au vécu, Azaïs avait inventé un système pour écrire en marchant, qu’il a testé lors d’une excursion au Cirque de Gavarnie en septembre 1800. Cette expérimentation est à l’origine de ce qui est sans doute, en France, le premier journal personnel publié de son vivant par l’auteur lui-même (Un mois de séjour dans les Pyrénées, 1809). Azaïs conçoit son journal comme une véritable œuvre, composée et travaillée, qui doit lui procurer du plaisir, et dont il fait à l’occasion des lectures choisies à ses intimes, lectures elles-mêmes racontées dans le journal. Ce travail de composition l’amène parfois, et il en a scrupule, à déborder la date de rédaction… Mon journal étant devenu presque malgré moi un ouvrage, je me trouve entraîné à donner à chaque article une forme qui me le rend à moi-même agréable. C’est pour cela que je ne suis pas toujours exact sur l’indication du moment où j’écris, et sur les petites circonstances qui interrompraient d’une manière froide et minutieuse une description à laquelle je m’abandonne, ou une discussion que je poursuis. 9 Il est, par exemple, peu d’articles que j’achève dans l’endroit et le jour même où je les commence. Je suis en train de sentiments et de pensées : cependant le temps me presse, je suis obligé de m’arrêter ; alors je m’arrête, sans arrêter l’article que j’aime à arrondir et à achever convenablement. (27 septembre 1801) D’autre part et surtout, Azaïs a été plusieurs fois traversé par l’idée que son journal, qui lui sert de laboratoire pour l’élaboration de ses théories et d’atelier pour la rédaction de son futur livre, serait peut-être, pour le public, bien plus intéressant à lire que ce livre même ! Ce qui l’a fait reculer, c’est qu’il n’est pas d’usage de publier soi-même ses brouillons de son vivant, à la place de son œuvre : or il aimerait, tout de même, avant de mourir, voir l’effet de ses idées ! Je lui laisse la parole pour clore cette étude par une magistrale « Poétique du brouillon ». Merci, cher Azaïs ! Maintenant que je crois avoir touché au but de mes recherches, j’ai une raison de plus de m’applaudir d’avoir fait ces recherches par écrit, dans mon journal, ou dans mes Études d’un solitaire. Je puis revoir avec intérêt la ligne de mes tâtonnements et de mes examens. Je puis mesurer de combien chaque jour m’avançait vers le point où je me trouve. Ce que je vais exposer ici, comme lien et complément de tout ce que j’avais écrit, ne sera cependant encore qu’un essai en présence de moi-même : je me donnerai ensuite le temps d’examiner et de réfléchir encore. Sur un objet si vaste, si élevé, je tremble devant l’audace d’imprimer à ma pensée un caractère définitif. (31 mai 1801) Je me dis quelquefois que d’après la forme que j’ai maintenant donnée à ce tableau de moimême, je ne pourrais jamais faire d’ouvrage qui puisse lui être préféré : en effet j’y dépose, depuis quelque temps, les pensées, les observations et les sentiments que j’ai le projet de réunir en corps d’ouvrage particulier. Dans mon journal, ces pensées et ces observations ne sont pas toujours liées entre elles ; mais elles sont liées à moi-même ; elles viennent dans mon journal comme elles me sont venues ; leur place se trouve ainsi naturelle ; car c’est ma nature qui a fixé le moment et la circonstance où elles devaient se placer dans ma tête et dans mon cœur. Cette liaison est plus intéressante et même plus vraie que l’ordre méthodique. Cependant ce n’est point ainsi que les hommes peuvent recevoir les pensées d’un auteur, du moins tant qu’il existe, car la mort efface, ou du moins adoucit beaucoup, cette défaveur très juste, qui est attirée sur un ouvrage par un ton de la personnalité. Aussi, un mouvement généreux est quelquefois donné à mon âme ; – je pense à n’écrire [que] mon journal, et à renvoyer après ma mort l’effet que pourront produire les idées que j’y dépose. (6 octobre 1801) * Voilà donc quatre aventures bien différentes, mais qui ont plusieurs traits en commun : 1) Une attention aiguë au surgissement de la pensée dans l’instant, et le désir de la capter par un acte d’écriture rapide. Cela implique souvent l’invention ou l’utilisation d’un dispositif de notation instantanée (Le Sage, qui souffrait d’insomnies, avait inventé un petit appareil pour écrire dans les ténèbres ; Azaïs, un système pour écrire en marchant ; Joubert, plus classiquement, se servait de petits carnets et de crayon). 2) La passion de dater avec précision, qui implique la décision de ne rien changer par la suite et le souci d’articuler dans le temps l’avant et l’après, en renonçant à la construction et à la composition. 10 Dans certains cas (Saint-Martin), la datation s’appuie sur une numérotation (la présentation numérotée de fragments, fréquente chez les moralistes classiques, n’avait pas la fonction chronologique qu’elle prend ici). 3) Le choix de donner à lire le journal lui-même, à la place d’une éventuelle œuvre. C’est un pis-aller pour Le Sage (qui reconnaît la valeur d’une œuvre achevée… mais se complaît à l’inachèvement) ; un laisser-aller pour Saint-Martin, qui aime le décousu et la prolixité ; un souci de transformer son journal en une œuvre plaisante pour Azaïs, qui lit ses journaux à ses proches, les recopie en les mettant au propre. Quant au journal de Joubert, c’est une expérience d’écriture, à la fois exercice spirituel et laboratoire poétique et graphique, dont la première fonction est de l’entretenir lui-même comme esprit vivant, et qu’il a abandonnée aux frontières de la lisibilité. En cette fin du XVIIIe siècle, c’est l’ouverture d’une très moderne poétique du brouillon qui, du Zibaldone de Leopardi aux Cahiers de Valéry, a un bel avenir devant elle ; et c’est surtout un premier pas vers la reconnaissance du journal comme œuvre à part entière. * BIBLIOGRAPHIE Georges-Louis Le Sage Fonds Le Sage, Bibliothèque de Genève, Ms fr 2001-2056 et 2063-2066, Ms suppl 512-519. Pierre Prévost, Notice de la vie et des écrits de Georges-Louis Le Sage, de Genève… rédigée d’après ses notes par Pierre Prevost… suivie d’un opuscule de Le Sage sur les Causes finales, d’extraits de sa correspondance…, Genève, J.-J. Paschoud, 1805, VIII-609 p. Bernard Gagnebin, « Un maniaque de l’introspection révélé par 35.000 cartes à jouer : Georges-Louis Le Sage », dans Mélanges d’histoire du livre et des bibliothèques offerts à M. Frantz Calot, Paris, Librairie d’Argences, 1960, p. 145-157. Luc Weibel, « Vous avez dit autobiographie ? », La Faute à Rousseau, n° 12, juin 1996, p. 65. Luc Weibel, « Le Sage ou le Je en fiches », Les Petits Frères d’Amiel. Entre autobiographie et journal intime, Genève, Zoé, 1997, p. 17-61 (p. 33-61, Anthologie). Louis-Claude de Saint-Martin Œuvres posthumes de M. de Saint-Martin, Tours, Letourmy, 1807, 2 vol. Louis-Claude de Saint-Martin, Mon portrait historique et philosophique (1789-1803), publié intégralement pour la première fois, d’après le manuscrit original, avec une préface, une introduction et des notes critiques par Robert Amadou, Paris, Julliard, 1961, XVII-471 p. Joseph Joubert Les carnets sont conservés dans la collection particulière de M. et Mme Paul du Chayla. 11 Il est impossible d’offrir ici une bibliographie de l’immense corpus des éditions de Joubert et des études dont il a fait l’objet. On pourra explorer cette histoire à partir des informations données par les éditions ou études les plus récentes, en particulier : Joseph Joubert, Pensées, jugements et notations, anthologie critique établie par Rémy Tessonneau, Paris, José Corti, 1989, 400 p. David P. Kinloch, The Thought and Art of Joseph Joubert (1754-1824), Oxford, Clarendon Press, 1992, XIII-231 p. Joseph Joubert, Carnets, textes recueillis sur les manuscrits autographes par André Beaunier, avant-propos de Jean-Paul Corsetti, Paris, Gallimard, 1994, 2 vol., 664 et 639 p. (réédition de l’édition de 1938). Joseph Joubert, 4 Carnets, édition établie et annotée par David Kinloch et Philippe Mangeot, London, University of London, Institute of Romance Studies, 1996. Pierre-Hyacinthe Azaïs Le manuscrit du premier Journal d’Azaïs (1799-1802) est à la Bibliothèque de l’Institut, à Paris (cote : 2637 à 2645, 8 vol.) ; celui de son Journal anniversaire aux Archives du Tarn, à Albi. Michel Baude, « Structure et signification du journal d’Azaïs », Le Moi à venir, Klincksieck, 1993, p. 14-105. Philippe Lejeune, « Hyacinthe Azaïs, diariste ambulant », et « Azaïs et le journal-œuvre », en ligne sur le site « Autopacte ». *